Le devoir de mise en garde du banquier vis à vis de la caution non avertie sur l'absence de viabilité de l'opération financée
Auteur : ALCALDE Céline
Publié le :
13/12/2017
13
décembre
déc.
12
2017
Jusqu'où ira l'extension des obligations du banquier vis à vis des cautions non averties?
Il s'agit d'une question que l'on peut légitimement se poser eu égard à la dernière jurisprudence rendue en la matière par la cour de cassation le 15 novembre 2017 ( Cass. com., 15 nov. 2017, n° 16-16790).
Dans ce cas d'espèce, une banque n'avait pas attiré l'attention de la caution, par ailleurs dirigeante de la société bénéficiant de l'engagement principal, sur le fait que "l'opération était vouée à l'échec dès son lancement".
Dans cette hypothèse, la cour d'appel n'était même pas dans l'obligation, selon la position de la cour de cassation, de rechercher si le cautionnement souscrit "fût adapté à ses propres capacités financières".
La solution est particulièrement sévère à l'endroit des banques qui pouvaient se réfugier derrière le fait que souvent la personne de la caution était le dirigeant du débiteur principal, donc à même de mesurer les bénéfices et les risques de l'opération financée.
Cette distinction n'a manifestement plus lieu d'être ; d'une obligation d'information, la jurisprudence tend à instaurer un véritable devoir de conseil du banquier vis à vis de son débiteur principal mais aussi au bénéfice de la caution dès lors que celle ci est mesure de démontrer qu'elle peut recevoir la qualité de caution non avertie.
La jurisprudence avait déjà remis en cause le principe selon lequel le dirigeant est ipso facto une caution avertie ( Cass. com., 13 nov. 2012, n° 11-24.178 : JurisData n° 2012-025848 ; JCP G 2013, 585, Simler ; Gaz. Pal. 13 déc. 2012, p. 13, obs. Albiges), cet arrêt est aussi une illustration d'une appréciation subjective de la qualité de caution avertie.
Reste un problème de taille pour le créancier: accéder à l'information permettant de démontrer que l'opération projetée était vouée à l'échec. Doit-il se poser en évaluateur économique au lieu et place du dirigeant alors pourtant qu'il n'est pas censé s'immiscer dans la gestion des entreprises de ses clients? Il y a lieu désormais pour les dispensateurs de crédits cautionnés par des personnes physiques de disposer de toutes les informations juridiques et économiques concernant l'opération financée et d'exiger leurs productions.
Cet article n'engage que son auteur.
Crédit photo : © Kromosphere - Fotolia.com
Historique
-
L’autonomie des contrats de réservation et de vente et le nécessaire respect du délai de réflexion
Publié le : 01/06/2018 01 juin juin 06 2018Actualités du cabinetLa cour de cassation, dans son arrêt du 12 avril 2018 n° 17-13118, réaffirme l'autonomie totale du contrat de réservation et du contrat de vente. Les contrats de vente d'imm...
-
Garantie décennale : pour que les désordres soient réparables, il faut qu’ils soient survenus...
Publié le : 02/05/2018 02 mai mai 05 2018Actualités du cabinetCour de cassation, Chambre civile 3, 28 févr. 2018, n° 17-12460 A la suite de travaux réceptionnés le 01/10/2001, des maitres d'ouvrage ont estimé que des désordres seraien...
-
Bail d’habitation : le jaunissement d'une peinture uniquement dû à l'usage normal du bien ne relève pas des réparations locatives
Publié le : 03/04/2018 03 avril avr. 04 2018Actualités du cabinetIl appartient au bailleur de caractériser que le jaunissement des peintures était imputable à un usage anormal par le locataire de la chose louée. Cour de cassation, Chambre...
-
Licenciement : pouvoir du juge et requalification des termes de la lettre de licenciement
Publié le : 06/02/2018 06 février févr. 02 2018Actualités du cabinetSi l'employeur a malencontreusement ou même volontairement fondé le licenciement sur une cause réelle et sérieuse, il ne peut par la suite espérer du juge une appréciation plus...
-
Le devoir de mise en garde du banquier vis à vis de la caution non avertie sur l'absence de viabilité de l'opération financée
Publié le : 13/12/2017 13 décembre déc. 12 2017Actualités du cabinetJusqu'où ira l'extension des obligations du banquier vis à vis des cautions non averties? Il s'agit d'une question que l'on peut légitimement se poser eu égard à la dernière...
-
Le Juge et la mise en œuvre de la clause résolutoire en matière de baux commerciaux
Publié le : 08/11/2017 08 novembre nov. 11 2017Actualités du cabinetLa cour de cassation vient une nouvelle fois rappeler par son arrêt du 05 octobre 2017 ( n°15-25018) que le Juge saisi en constatation du jeu de la clause résolutoire n'a aucun...